Burkina Faso : la longue route vers la démocratie (Afrique Magazine, décembre 2015)

L’édition 2015 du fameux Tour du Faso s’est tenue dans un contexte inédit : un an après la chute de Blaise Compaoré et à quelques jours des premières élections libres. Une occasion de prendre la température du pays.

Il est 8h30 du matin à Ouagadougou. Les cyclistes s’alignent au compte-gouttes sur la ligne de départ matérialisée par un grand portique gonflable. Assis à quelques mètres de là, le président du Conseil natio- nal de transition (CNT), Chérif Sy, et le ministre des Sports et des Loisirs, David Kabré, regardent avec satisfaction le ballet des vélos et les nombreux spectateurs qui se pressent au bord du goudron.

C’est qu’il s’en est fallu de peu que le Tour du Faso 2015, qui s’est disputé du 30 octobre au 8 novembre, n’ait pas lieu. Le 16 septembre, alors que la campagne présidentielle s’apprêtait à débuter, le général Gilbert Diendéré et les hommes du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) avaient fait irruption dans la salle où le président du régime de transition, Michel Kafando, son Premier ministre, Isaac Zida, et les ministres étaient réunis. Les hommes avaient été détenus durant plusieurs jours tandis que l’ex-garde rap- prochée de Blaise Compaoré semait la terreur dans les rues de Ouagadougou – quatorze morts imputables à leurs tirs et 271 blessés, selon Amnesty International –, paralysant le pays durant une semaine. Mais après l’échec du putsch, le gouvernement de transition a tout fait pour que l’événement sportif soit maintenu, revoyant même les subventions à la hausse. « Nous tenions vraiment à ce que cette compétition nationale ait lieu cette année pour montrer que la sécurité et la paix sont revenues au Burkina Faso », souligne le ministre en s’épongeant le front. Au final, douze équipes, dont trois locales et deux européennes (Allemagne et Suisse), sont ali- gnées sur la ligne de départ, contre seize en 2013 (le Tour a été annulé en 2014 en raison d’Ebola). C’est qu’à l’extérieur comme sur le sol burkinabé, cette épreuve créée en 1987 – année où Blaise Compaoré prenait le pouvoir – est un indicateur de l’état du pays. Et cette édition 2015, en cette période de transition, est tout un symbole. D’ailleurs, Alas- sane Ouangrawa, le président de la Fédération burkinabè de cyclisme, l’a baptisée « Tour de la renaissance ».

D’ailleurs, Alassane Ouangrawa, le président de la Fédération burkinabè de cyclisme, l’a baptisée « Tour de la renaissance ». « Qu’elle se tienne effectivement veut dire que tout va bien, que tout est revenu à la normale », confirme Francis Ducreux, créateur du Tour et régisseur de la 29e édition, qui raconte que Blaise Compaoré fut à une époque un habitué des départs. « Même s’il a été difficile pour les coureurs de se préparer à cause du coup d’État, il était très important que l’épreuve ait lieu cette année », appuie Mathias Sorgho, 25 ans, étudiant en sciences de la vie et de la Terre à l’univer- sité de Ouagadougou et étoile montante du cyclisme natio- nal, « car le vélo chez nous est très populaire et les habitants ont besoin de se divertir après la situation difficile que nous avons traversée ces derniers temps. Avec la reprise, on espère maintenant que tout ira bien ». Retour à la normale, donc?

 

Retrouvez la suite de ce reportage de Raphaël Fournier (photos) et Léonor Lumineau (texte) dans Afrique Magazine du mois de décembre 2015.

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